De Tulum à Cancun la côte est chargée de complexes hôteliers luxueux. Certaines parcelles (de plus en plus rares ) restent encore elles sont utilisées comme ranchs et doivent déjà valoir un bon paquet de l’hectomètre carré…  Playa del Carmen c’est un petit Cancun avec moins de drogues et de violences, deux villes jeunes dont le développement s’est essentiellement fait grâce au tourisme. Le seul local que je rencontre pendant les trois semaines que j’ai passées là bas me le confirme: « il y a 30 ans, il n’y avait rien ici. ». A playa del Carmen tout se passe sur la cinquième, c’est sur cette longue rue piétonne que se sont nichés tous bars et restaurants branchés de la ville. C’est aussi là qu’on se retrouve tous à chercher du taff en arrivant.

Moi je reste chez Martha de Monterrey et sa colloc italienne. Martha parle français et travaille à Playa depuis 3 mois en réception. Dès le premier jour on me fait me sentir comme à la maison, on se fera de beaux diners avec les voisins et les amis travailleurs. Entre les longues siestes que je m’accorde et les interludes pendant lesquels je travaille sur un projet de bar que je découvre d’ailleurs moins innovant que je l’aurais pensé, je cherche du boulot. Les travailleurs étrangés sont recherchés pour les langues, néanmoins, depuis la nouvelle loi qui durci les formalités  d’obtention du visa de travail (FM3), on ne prend plus trop le risque d’embaucher au noir sans contact sur. Du coup, pas si simple, sans compter que je suis à présent illégal au Mexique depuis quelque jours.

Je décroche un jour d’essais comme serveur dans un restaurant. Je ne suis pas contre le fait de passer la serpillère, ni de cuisiner, ni de faire du rayonnage, de la manutention, de l’empaquetage, la vaisselle ou encore de vider la corbeille des toilettes. J’ai été bien formé à fermer ma gueule et à faire les choses bien, je m’y applique. C’est juste que je ne peux pas supporter son attitude à elle, ça devait beaucoup l’exciter d’avoir un petit chien güero. Et lui, pas foutu de dire « Por favor » ni même merci. En plus de ça on me prend pour un con… Du coup à la mi-journée je sais déjà que je ne resterai pas, même si il ne sera pas évident de trouver autre chose. On a toujours le choix. Fin de journée, je partage la soupe avec la petite dame qui fait le ménage, elle vient de la campagne autour, elle en chie, on est déjà complices. Au moment où je pars on me fait comprendre que ça serait super cool si je restais (tu m’étonnes). Je décline et demande à être payé pour ma journée de travail. Ils me refusent jusqu’au partage du tip… Je ne suis pas sur d’avoir bien saisi. Le ton monte, j’avertis : « tu as le choix, tu fais ce qui est juste et tu me donnes ce que tu me dois ou cette plaisanterie va vous coûter beaucoup plus cher qu’une journée de salaire, tu veux prendre le risque? ». Sur le cul, ils avalent leur salive avant de refuser à nouveau.
Si je prends le temps de compter cette histoire c’est qu’il n’y pas si longtemps je serais aller jusqu’au bout. Je suis heureux de  vous compter ce changement. » 4 heures du matin le jour suivant, je me retrouve en face de la grande baie vitrée, un pavé dans chaque main. Non, j’ai pas peur. Oui, ils le méritent… Les pavés tombent à mes pieds, je rentre. Non, j’ai pas vu la vierge. Je viens juste de réaliser que ces pavés risquent bien d’exploser cette vitre, ça c’est le côté visible. Ce que je ne voyais pas jusque maintenant c’est les fissures que cet acte va me causer à moi et ce, même si je ne me fait pas prendre. Je sais faire, ça peut servir, mais pas aujourd’hui. »

Après cette expérience, je laisse de côté l’idée de bosser dans ce secteur et trouve une toute autre opportunité  qui va m’enchanter. Un allemand vient tout juste d’ouvrir un business de livraison de bouffe à domicile écolo, ils sont tous a vélo. Ce qu’il cherche c’est du jeune rapide sans moteur. J’étais resté envieux des bikers de NYC avec qui je rivalisais, vivre de ça devait être juste trop classe! J’avais aujourd’hui l’opportunité de faire mes preuves à roller sur les côtes des caraïbes. Beaucoup de gens ont du mal à croire que c’est plus rapide que de prendre la voiture… De la je bosse aussi comme livreur à roller pour une laverie, ça faisait longtemps que je n’avais pas autant patiné!

Le Mexique c’est un monde d’opportunités. Tu penses que j’aurais du accepter ce boulot de mule pour Cuba? Ce travail de stripper peut être? Dommage, je ne me laisse pas le temps. Je dois rejoindre Marinette au Costa fin juillet et je viens de me rajouter une nouvelle escale à Tuxtla.

Le retour vers l’état de Chiapas s’avère plus difficile que l’allée. Je passe par l’autre côté, par Merida. J’en profite pour m’arrêter aux ruines de Chichen Itza, je passe aussi voir un couple de copains dans la ville de Campeche où je pourrais prendre un douche et voir le centre. 4 jours sur la route pour un itinéraire que Google maps prévoit en 14 heures. Il faut dire que je me suis un peu laisse porter et ça a failli me couter cher. Le bon cote c’est que j’ai découvert des endroits sympas, notamment Izamal et son église impressionnante ou encore Ciudad del Carmen… Ce qui m’a fait perdre beaucoup de temps c’est ce trucker qui commençais a n’emmener trop au nord direction Veracruz, il commence a être vraiment nerveux, ça sent mauvais. Je profite d’un ralentissement d’un barrage de l’armée a hauteur de Coatzacoalcos pour sauter. Il est déjà tard pour continuer et toute la caratera depuis Villahermosa et vraiment malfamée. J’arrive a négocier de mettre au moins mon sac à l’abri dans une petite tienda  littéralement barricadée d’où sort un peu de lumière. Je ne dors pas beaucoup cette nuit là après avoir partage quelques tacos offerts par quelques militaires au cul d’une camionnette. Ils restent dubitatifs sur mon intention de passer la nuit dans les environs.

Quelque jour avant de partir j’avais consulte couchsurfing. Miguel m’avait répondu et m’attend le vendredi soir quand j’arrive pour une fiesta de folie chez lui. C’est tout le beau petit monde artiste/musico/alternatif de Tuxtla et Saint Cristobal réuni au même endroit. J’irai récupérer mon ordi qui était resté à l’école, mais non sans peine… Les amis gros bras de Miguel assurent le coup. FX m’avait pourtant averti: les mexicains, l’argent et l’amitié,  il vaut mieux pas trop les laisser ensemble, ils finissent par se mettre dessus.

Dans la famille de Miguel on est très axé culture, le jardin est magnifique et ses parents qui vivent dans la maison à côté sont sages et influents. Ils sont dans le buisness. Miguel lui est info-graphiste, il fait vraiment du bon boulot et ça manque ici. Il avait justement besoin d’un intégrateur, on bosse ensemble, le salon/studio devient ma chambre et bureau. Y’a toujours du monde ici, ils passent, ils jouent, enregistrent, réunionent. Ça fume, ça renifle et boit, la vida loca. Du coup je dors pas beaucoup ces derniers temps, le canap se libère en moyenne vers 4-5h. J’arrive au bout du premier projet, Pochota.

Ici la saison des pluies a commencé. Généralement une seule fois par jours pendant plusieurs heures, des pluies d’une intensité que je n’avais encore jamais vu. Les rues se transforment en rivière et les voitures s’inondent. Ça y est, j’ai compris pourquoi on vois autant de 4×4 dans le coin. J’ai tellement envie de me faire un petit délire avec mon slip de bain, mon savon et ma petite brosse aux heures où ça tombe! Ce qui est un peu décourageant c’est de savoir que ces torrents urbains sont encore plus sales qu’ils n’y paraissent, petit mélange d’eau de canalisation oblige… Je compte continuer à adapter mon matériel qui commence à être de plus en plus pesant plus je descend. J’aurais cru que cet aspect aurait plutôt eu tendance à s’inverser, et bien non. Avoir sa maison sur son dos ça coûte.

Dans le coin on trouve beaucoup d’artisanat régional mais aussi de l’artisanat qu’ils disent « hippy ». Je suis personnellement resté scotché devant certaines pièces en fil ciré serties de pierres ou de fragments d’os. Plutôt que de les acheter je me suis mis en tête d’apprendre à en faire moi même, en plus, ici c’est l’un des rares endroits  du globe où on trouve de l’ambre. Je dois me rendre dans un petit village où ils l’extraient et la vendent au poids à des prix fous avec un ami de Miguel qui vit de la-bas. Je n’aurai par contre certainement pas le temps d’apprendre à travailler la pierre ici, ils restent protectionnistes et je ne suis pas directement sur place. J’achèterai des pierres travaillées pour sertir et d’autres brutes, j’apprendrai plus au sud.